jeudi 30 octobre 2008

Il faut toujours méditer nos Classiques ...

Merci à Sébastien pour cette excellente lecture.
Et comme avec les cours de Jean-Yves Boriaud (La divination, Térence et le théâtre, j'ai repris goût aux auteurs latins)


TACITE... "ses vérités sont les nôtres", comme dirait notre cher ministre.
Amis économistes et citoyens, prenez la peine de relire cet extrait du
livre VI des "Annales" jusqu'au bout :


XVI. Cependant une légion d'accusateurs se déchaîna contre ceux qui
s'enrichissaient par l'usure, au mépris d'une loi du dictateur César sur
la proportion des créances et des possessions en Italie , loi depuis
longtemps mise en oubli par l'intérêt particulier, auquel le bien public
est toujours sacrifié. L'usure fut de tout temps le fléau de cette ville
[Rome], et une cause sans cesse renaissante de discordes et de séditions.
Aussi, même dans des siècles où les mœurs étaient moins corrompues, on
s'occupa de la combattre. Les Douze Tables réduisirent d'abord à un pour
cent l'intérêt, qui, auparavant, n'avait de bornes que la cupidité des
riches. Ensuite un tribun le fit encore diminuer de moitié ; enfin on
défendit tout prêt à usure, et de nombreux plébiscites furent rendus pour
prévenir les fraudes de l'avarice, qui, tant de fois réprimées, se
reproduisaient avec une merveilleuse adresse. Le préteur Gracchus [c'est
tout à fait l'équivalent d'un "député socialiste ou communiste"; il a
d'ailleurs été assassiné un peu plus tard - note de S.Cazalas !], devant
qui se faisaient les poursuites dont nous parlons ici, fut effrayé du
grand nombre des accusés et consulta le sénat. Les sénateurs alarmés (car
pas un ne se sentait irréprochable) demandèrent grâce au prince. Leur
prière fut entendue, et dix-huit mois furent donnés à chacun pour régler
ses affaires domestiques comme la loi l'exigeait.

XVII. Des remboursements qui remuaient à la fois toutes les dettes, et la
perte des biens de tant de condamnés, qui accumulait dans le fisc ou dans
l'épargne les espèces monnayées, rendirent l'argent rare. Ajoutez un
décret du sénat qui enjoignait aux prêteurs de placer en biens-fonds
situés dans l'Italie les deux tiers de leurs créances. Or ceux-ci les
exigeaient en entier ; et les débiteurs, requis de payer, ne pouvaient
sans honte rester au-dessous de leurs engagements. En vain ils courent,
ils sollicitent ; le tribunal du préteur retentit bientôt de demandes. Les
ventes et les achats, où l'on avait cru trouver un remède, augmentèrent le
mal. Plus d'emprunts possibles ; les riches serraient leur argent pour
acheter des terres. La multitude des ventes en fit tomber le prix ; et
plus on était obéré, plus on avait de peine à trouver des acheteurs.
Beaucoup de fortunes étaient renversées, et la perte des biens entraînait
celle du rang et de la réputation. Enfin Tibère soulagea cette détresse en
faisant un fonds de cent millions de sesterces, sur lesquels l'État
prêtait sans intérêt, pendant trois ans, à condition que le débiteur
donnerait une caution en biens-fonds du double de la somme empruntée.
Ainsi l’on vit renaître le crédit, et peu à peu les particuliers même
prêtèrent. Quant aux achats de biens, on ne s’en tint pas à la rigueur du
sénatus-consulte ; et c'est le sort de toutes les réformes, sévères au
commencement, à la fin négligées.


Il faut toujours méditer nos Classiques ...
Bonne continuation de vacances,
Sébastien Cazalas.

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